Le commerce ambulant est une réalité au Burundi. Exercé dans le cadre du commerce informel, la majorité des commerçants ambulants ignorent la loi qui les régit. Que dit la loi sur ce genre de commerce ? Existe-t-il des entraves ? Le point avec notre collègue Edgard Mugenzi.

Commençons par une brève lecture du code de commerce révisé le 16 février 2015. L’article 45 définit un commerçant ambulant comme le marchand détaillant qui se déplace constamment d’un endroit à un autre du territoire national, pour une durée variable, afin d’y exercer un commerce dont le chiffre d’affaires ne dépasse pas un montant déterminé par ordonnance conjointe des Ministres ayant les finances et le commerce dans leurs attributions.

Comme facilité dans cet article 45, le commerçant ambulant est dispensé de l’immatriculation au registre du commerce, mais est tenu d’obtenir dans la commune de sa résidence un numéro d’identification de commerçant ambulant. Dans l’article 46, ce numéro d’identification est délivré gratuitement, sur simple demande écrite et sans qu’aucune condition ne soit exigée pour son obtention. Même si l’article 48 est clair quant au fait que nul ne peut exercer le commerce ambulant s’il n’est détenteur du numéro d’identification de commerçant ambulant, l’article 49 exempte d’obligation de ce numéro les commerçants ambulants des produits artisanaux, agricoles et d’élevage.

L’extrait du registre ambulant, un calvaire

Premièrement, selon le code du commerce, l’extrait du registre de commerce ambulant avec numéro d’identification est délivré gratuitement par l’administration communale. Mais ce n’est pas le cas dans la capitale économique Bujumbura. Pour des raisons de sécurité, le ministère de la Sécurité publique a demandé aux commerçants de se regrouper dans des associations pour faciliter leur identification. « En commune Mukaza, pour avoir l’extrait du registre de commerce ambulant et le numéro d’identification, le commerçant doit être membre de l’Association pour la Promotion du Développement et Encadrement des Jeunes en Chômage (APDEJC), moyennant une somme de 40 000 Fbu à cette association », déclare Niyonzima Wilson, commerçant ambulant rencontré à Mukaza.

Comme l’administration communale accorde cet extrait aux commerçants dont les noms figurent sur la liste préétablie par l’APDEJC, en payant les 40 000 Fbu, cela revient en réalité à faire payer pour ces documents. « En raison du faible capital et du processus complexe, ces documents sont ainsi devenus un sésame difficile à décrocher, car, demander 40 000 Fbu pour quelqu’un qui a un capital qui ne dépasse pas 10 000 Fbu, est un casse-tête », poursuit Wilson.

Autres bémols

Deuxièmement, ce ne sont pas tous les produits qui sont acceptés d’être vendus en ambulatoire. Selon l’article 2 de l’ordonnance ministérielle du 3 novembre 2017, certains produits sont interdits au commerce ambulant. Ce sont notamment les médicaments et les produits médicaux, les articles en métal précieux, les articles d’horlogerie, les pierres précieuses et semi-précieuses, les billets de loterie, les toxiques, les eaux distillées et non distillées, les appareils médicaux et orthopédiques, les boissons spiritueuses, les appareils d’optique et de lunetterie à l’exception des lunettes solaires sans effet correcteurs, les appareils électriques et électroniques ainsi que leurs accessoires, les bijoux et autres que ceux fabriqués en métal précieux, les produit d’imitation et les produits cosmétiques.

Troisièmement, même s’ils s’observent des mineurs dans le commerce ambulant, l’article 14 stipule que l’autorisation d’exercer le commerce par le mineur de moins de dix-huit ans est accordée par ordonnance du président du tribunal de grande instance du lieu du domicile du mineur.

Quatrièmement, même si le commerce ambulant est légal sur tout le territoire via le code du commerce, certaines ordonnances ministérielles ont délimité et banni ce commerce dans certains endroits, surtout dans la ville de Bujumbura, où même ce commerce avait été suspendu en 2017.

Cinquièmement, il se remarque une catégorie de marchands ambulants qui portent un gilet ou badge vendu par les services de la Mairie pour identification, et les porteurs ne sont pas pourchassés par la police. Une politique de deux poids deux mesures, puisque le port du gilet/badge ne concerne pas les petits commerçants de légumes, fruits et arachides par exemple. Sinon, tous les prestataires payeront et le porteraient  pour éviter les mauvais traitements, et les discriminations éventuelles de la part des forces de l’ordre.

Alors que le secteur informel dont le commerce ambulant fait partie représente 77 % du PIB, et plus de 90 % d’emplois, les entraves tant au niveau des limitations d’espace pour ce commerce et l’obtention de l’extrait du registre de commerce et du numéro d’identification devrait être abolis pour faciliter leur enregistrement et identification, sans oublier de reconnaître officiellement ce genre de commerce pour faire face à la pauvreté et au chômage récurrent.

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