Les affaires ne riment pas avec la violence. Or, la région des Grands Lacs est beaucoup agitée sur le plan politique et surtout sécuritaire.  Le blogueur Yannick Ndayisaba appelle les jeunes à être des faiseurs de paix afin que des habitants de cette région travaillent pour l’augmentation des richesses.  

La région des Grands Lacs africains connaît en général une population très jeune. Selon les données du dernier recensement de la population burundaise, 66% avaient par exemple moins de 25 ans. La force numérique que nous sommes en mesure de déployer peut influencer le changement dans tous les sens. Hélas, notre force s’avère plus destructrice que créatrice du moment que nous restons nourris aux mamelles de la violence. 

Les jeunes en proie aux manipulations

Jeunes avenir de demain, nous livrons souvent notre force à quiconque désire la canaliser à son gré malgré le gré des gendarmes du monde. Le regard flouté par la faim, nous acquiesçons  tout ce que nous dictent ceux qui viennent vers nous, le gâteau à la main.

Et ces derniers, impatients de se tailler la part du lion sur le gâteau national, forgent des idéologies chauvines et les bourrent dans nos crânes. Ils balancent la musique et nous, talentueux cavaliers et cavalières «émancipées», suivons la cadence. Engloutis dans l’ambiance suicidaire, «la tolérance zéro» de certaines paroles intolérables est tolérée à 100%. Ainsi, nous devenons leurs porte-paroles, leurs porte-machettes.  

Du pays des ambianceurs au pays des tambours sacrés en passant par celui des mille collines, j’en entends des histoires choquantes, douloureuses et  des propos nocifs  à la stabilité socio-économique.  Cette région inter-lacustre a connu des dates pénibles dans son histoire. Il n’y a pas un jeune de ma génération qui n’a pas encore vu défiler les gros véhicules transportant des casques bleus de l’ONU, des populations courant à perdre haleine pour rejoindre des camps de réfugiés où ils s’y font ensuite accueillir par une épidémie de choléra. Ce n’est sûrement pas les images que nous aimerions que nos enfants  contemplent en grandissant.

Et si on canalisait notre force autrement?  

Une objection de conscience s’impose. Pourquoi obéissons-nous aux stimuli des entrepreneurs de la violence et bouchons les oreilles aux appels au développement? Homo homini lupus est (L’homme est un loup pour l’homme). Voici en quoi nous nous métamorphosons quand nous confondons la force à la violence.

Tant que nous, jeunes, n’aurons pas encore compris que nous sommes à la fois acteurs zélés et victimes de la violence, que nous manquons cruellement de solidarité devant nos besoins communs, nous marcherons à jamais à côté de nos pompes. Il est grand temps, si pas tard, que nous pensions à rompre avec cet engrenage infernal et utilisions notre force pour remettre nos pays sur les rails du développement. Mais il n’y a pas que le savoir-faire pour y arriver, le savoir-vivre est aussi indispensable. «Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères ou périr comme des idiots », dixit Martin Luther.

Toutefois, laisse-moi m’adresser aux plus jeunes dans le langage qu’ils comprendraient mieux : celui de la violence. Je vous recommande la seule violence acceptable, un djihad contre soi-même. Cette auto-violence qui fut pratiquée par les prosélytes de la non-violence (Gandhi, Mandela, Luther,…). Cette violence sacrificielle, c’est un pas vers l’autre. Comme le souligne Thucydide, « de toutes les manifestations de la puissance, c’est la retenue qui impressionne le plus ».

Voici un judo intellectuel contre les violences de masse qui gangrènent notre région inter-lacustre et lui tirent des balles dans les pieds dans sa course à la croissance économique. Lançons ce défi à nous-mêmes et au monde afin de transcender nos différences et éradiquer toute idéologie légitimatrice de la violence.