Le 30 juin 1801, Frédéric Bastiat, le grand pionner du libéralisme, naquît. À l’occasion de son 221ème anniversaire, nos collègues Aimable Manirakiza et Franck Arnaud Ndorukwigira se sont plongés dans les écrits de ce grand penseur libéral pour mettre en parallèle « ce qui se voit » et « ce qui ne se voit pas » avec le budget général de l’Etat du Burundi, exercice 2022-2023.
La loi budgétaire 2022-2023 du Burundi vient d’être adoptée par l’Assemblée nationale. Les recettes globales passent de 1562,06 milliards de BIF (en 2021-2022) à 2193,6 milliards de BIF (en 2022-2023). Une augmentation de 40,4 %. Quant’aux charges, elles passent de 1713,8 milliards de BIF (en 2021-2022) pour 2391,08 milliards de BIF (en 2022-2023). Un accroissement de 39,5 %. Jusqu’ici, les recettes ne couvriront pas les besoins. Le déficit global s’élève à 197,4 milliards de BIF (en 2022-2023) contre 151,8 milliards de BIF (en 2021-2022), soit une hausse de 2,38%.
Le hic avec ce budget de l’Etat, elles sont 14 nouvelles mesures fiscales qui ont été instituées pour financer ce déficit, et cela dans un contexte marqué par l’inflation qui a atteint 9,2 % en 2022. Ces mesures fiscales sont une taxe de 15% sur les locations des véhicules et autres engins, une taxe de 1% sur la commission perçue par l’intermédiaire sur chaque opération de transfert d’argent mobile, la taxe de 10 % des honoraires encaissées pour les notaires et les avocats, un impôt forfaitaire libératoire trimestriel sur le transport rémunéré, un taxe additionnelle de la plaque d’immatriculation personnalisée, la taxe ad valorem de 1,5 % de la valeur en douane appliquée à toutes les importations sauf les produits pétroliers pour financer les infrastructures,…
Ce que dirait Fréderic Bastiat
Sa première réflexion serait axée sur l’augmentation du déficit budgétaire. Bastiat se demanderait pourquoi il y a un déficit chronique et pourquoi nos finances sont-elles dérangées. « Parce que, pour les représentants, il n’y a rien de plus facile que de voter une dépense, et rien de plus difficile que de voter une recette ». En plus, « tout le monde veut vivre aux dépens de l’État, et on oublie que l’État vit aux dépens de tout le monde. ». Pour Bastiat, « lourd budget et liberté sont incompatibles ».
Selon toujours Bastiat, la liberté n’existe plus quand le peuple est surtaxé et augmenter les impôts provoque une baisse des recettes. Pour cet économiste, si un impôt est graduellement et indéfiniment élevé, par cela même qu’à chaque degré d’élévation, il restreint un peu plus la consommation ou la matière imposable, un moment arrive nécessairement où la moindre addition à la taxe diminue la recette.
L’interventionnisme de l’Etat, un bémol
Une lecture minutieuse du budget montre bel et bien que l’État interviendra presque dans tous en 2022-2023. Or, selon Frédéric Bastiat, l’intervention permanente de l’Etat trouble toute activité économique. « Je vous avoue que l’avenir m’inquiète beaucoup. Comment l’industrie pourra-t-elle reprendre, quand il est admis en principe que le domaine des décrets est illimité ? Quand chaque minute, un décret sur les salaires, sur les heures de travail, sur le prix des choses, etc, peut déranger toutes les combinaisons ? » souligne l’homme politique.
Pour ce magistrat, sous le régime de la liberté, le résultat est là qui avertit à chaque instant si l’on fait ou non fausse route. Mais quand l’État s’en mêle, c’est tout différent ; car quoiqu’il ne puisse pas changer le résultat général et faire que la perte soit bénéfice, il peut fort bien altérer les résultats partiels et faire que les pertes de l’un retombent sur l’autre. Il peut, par des taxes plus ou moins déguisées, rendre une industrie lucrative aux dépens de la communauté, attirer vers elle l’activité des citoyens, par un déplorable déplacement du capital.
Que faire selon Frédéric Bastiat ?
La solution repose dans le libéralisme. Pour ce penseur libéral, « On a essayé tant de choses, quand est-ce donc qu’on essayera la plus simple de toutes : la Liberté ? Il fait en sorte que la taxe se confonde avec le prix des choses, afin que le contribuable la paye sans s’en douter. De là les impôts de consommation, si funestes aux libres mouvements de l’industrie. Or, quiconque s’est occupé de finances sait bien que ce genre d’impôt n’est productif qu’à la condition de frapper les objets de la consommation la plus générale. On a beau fonder des espérances sur les taxes somptuaires, je les appelle de tous mes vœux par des motifs d’équité, mais elles ne peuvent jamais apporter qu’un faible contingent à un gros budget ».
Frédéric Bastiat conclut la piste de solution en incitant les Burundais au libre-échange. « Je dis que, plus nos impôts sont lourds, plus nous devons nous empresser d’ouvrir nos ports et nos frontières à l’étranger moins grevé que nous. Et pourquoi ? Pour lui repasser une plus grande partie de notre fardeau. N’est-ce point un axiome incontestable en économie politique, que les impôts, à la longue, retombent sur le consommateur ? Plus nos échanges seront multipliés, plus les consommateurs étrangers nous rembourseront de taxes incorporées dans les produits que nous leur vendrons » conclut le défenseur de la liberté de l’individu, Frédéric Bastiat.