Les décisions budgétaires de l’État nous concernent tous. Entre hausse des réformes fiscales, accroissement de la dette publique et déficit budgétaire, notre collègue Franck Arnaud Ndorukwigira montre comment le budget de l’Etat peut changer des vies, positivement ou négativement.
Le budget de l’État montre ses priorités. Il joue un rôle essentiel pour répondre aux besoins de la population, et créer des opportunités permettant aux entrepreneurs, aux familles et aux communautés de s’épanouir, de réduire les disparités économiques en matière d’accès à l’emploi, à l’éducation et à la santé. Bref, à la prospérité du pays.
Un budget de l’Etat, c’est donc un compte qui retrace les recettes de l’Etat, moins ses dépenses, la différence étant le solde. Si les dépenses sont supérieures aux recettes, alors il se forme un déficit. Ce déficit budgétaire doit être financé, et il ne peut l’être que par un accroissement de la dette publique intérieure. Cela entraîne une introduction année après année de nouvelles taxes, pour accroître la pression fiscale qui va compenser ces dépenses. Et comme conséquence, ça entrave le développement du secteur privé, étouffe les activités entrepreneuriales des petites et moyennes entreprises, impacte négativement la vie des ménages, ce qui accentue la pauvreté dans le pays. Une preuve que le manque d’orthodoxie dans les dépenses publiques tue l’économie nationale.
Ce qu’il fallait démontrer
Partons du récent cas du Kenya. Le nouveau projet de loi des finances qui vient d’être retiré, prévoyait de rapporter dans les caisses de l’Etat 354 milliards de shillings (environ 2,5 milliards d’euros) de plus que l’année précédente en provenance des taxes et impôts. Il était prévu une hausse de la TVA de 16 % sur le pain et un prélèvement annuel de 2,5 % de taxe sur les véhicules des particuliers. Ce n’est pas tout, le projet de loi prévoit également une hausse des prix dans le domaine de la santé. Comme conséquence des budgets pareils, en mai 2024, le Kenya a connu une inflation de 5,1 % avec une hausse respective des prix des produits alimentaires et du carburant de 6,2 % et de 7,8 %. Aujourd’hui, la dette publique de ce pays s’élève à 10 000 milliards de shillings (environ 70 milliards d’euros).
En jetant un œil à la loi portant fixation du budget général de l’Etat au Burundi exercice 2024-2025, le total des ressources (recettes) vont passer de 3.371,6 milliards de BIF en 2023/2024 à 3.980,09 milliards de BIF en 2024/2025, soit une augmentation de 18,04 %. Les dépenses totales de l’Etat passent de 3.780,95 milliards de BIF en 2023/2024 à 4.429,70 milliards de BIF pour l’exercice 2024/2025, soit un accroissement de 17,15 %. Le déficit global du projet de loi des finances 2024/2025 s’élève à 449,60 milliards de BIF contre 426,51 milliards de BIF en 2023/2024. Avec cette loi, au moins 20 nouvelles mesures fiscales ont été introduites. L’année dernière, avec cette même pression fiscale, les recettes totales ont connu une augmentation de 46,9 %, témoignant que la volonté du gouvernement d’élargir l’assiette fiscale demeure irréversible. Et comme conséquence, la dette publique suit une courbe ascendante. Elle était à 6 mille milliards de BIF, fin juin 2023, dominée par la dette intérieure à plus de 70 %, ce qui met à mal le secteur privé, l’économie du pays et la vie de la population.
Éviter que le taux mange l’assiette
Avec ces données, nous voyons que les dépenses publiques s’envolent. Les déficits aussi. Les propos apaisants des ministres lors du vote des budgets au parlement ne sont que poudre aux yeux. Et la présentation des budgets cherche à masquer les problèmes. Face à une telle situation, il est urgent que les gouvernements de l’EAC définissent et mettent en œuvre une politique budgétaire efficace et efficiente, capable de porter l’EAC vers le niveau de développement espéré.
L’urgence est donc des réformes budgétaires pour que les Budgets des Etats de l’EAC ne puissent pas être un goulot d’étranglement fiscal pour l’émergence économique des pays. Ainsi, les législateurs des États ont besoin d’informations précises et utiles sur le coût des propositions liées aux dépenses et à la fiscalité pour prendre de bonnes décisions concernant les propositions budgétaires de l’exécutif. Ce manque d’informations peut amener les législateurs à adopter des propositions qui entraînent de graves problèmes budgétaires, nuisant à l’émergence économique, à l’esprit entrepreneurial, et même à la capacité des États à assurer des systèmes éducatifs et sanitaires de haute qualité, des routes et des ponts, ainsi que d’autres investissements qui constituent la base d’une forte croissance économique.