Les règles d’origine complexes et strictes peuvent empêcher les entreprises burundaises de profiter de la zone de libre-échange continentale africaine. Compte tenu que les pays africains ont des capacités de production et leur compétitivité à des niveaux inégaux, notre collègue Francis Cubahiro appelle à des réformes des règles existantes pour aider les entreprises à tirer parti de la Zlecaf.

Pour le CDE Great Lakes, « les règles d’origines doivent être simples et précises parce qu’elles ne doivent pas prêter à des confusions entre opérateurs économiques, administrateurs de douanes et industriels. Elles doivent être faciles à comprendre, transparentes, prévisibles et stables ».

Pour comprendre cette assertion, il faut savoir que les règles d’origine sont un passeport qui permet aux marchandises de circuler en bénéficiant de droits de douane préférentiels. Elles sont dites « préférentielles » lorsque le bien est échangé entre deux États ayant conclu un accord bilatéral ou régional, ou « non préférentielles » lorsque le bien est échangé entre deux États n’ayant pas conclu un tel accord. Ces règles d’origine sont donc l’une des clefs de voûte de la libéralisation préférentielle du commerce entre les membres de la Zlecaf. Sans elles, l’Afrique, et le Burundi en particulier, ne saurait profiter des retombées de cette zone. 

Complexité

Surnommées « passeport des marchandises », ces règles d’origine sont souvent complexes à respecter pour les produits fabriqués à partir de matériaux provenant de différents pays selon des chaînes de valeur modernes, ce qui rend difficile l’accès des produits aux préférences commerciales. Par exemple, pour une chemise en coton, le coton peut être cultivé au Burundi, le tissage et teinture du tissu en Ouganda, les boutons et fil en provenance de l’Ethiopie, le découpage et assemblage au Kenya. Malgré que de nombreux pays soient intervenus dans la fabrication de cette chemise, elle doit avoir un seul pays d’origine.

Cette complexité s’accroît aussi du fait de l’appartenance à plusieurs communautés économiques régionales dont les règles sont concurrentes. Le Burundi est membre de l’EAC, du COMESA, du CEPGL et du CEEAC. Avec le Zlecaf, il y aura nécessité que les États membres de l’EAC, le Burundi y compris, envisagent de réformer leurs règles d’origine pour les aligner sur les meilleures pratiques de la Zlecaf.

Tremplin du commerce burundais

Si certaines industries ou entreprises burundaises ne sont pas en mesure de tirer parti des possibilités offertes par l’accord commercial préférentiel de la Zlecaf, cela pourrait entraîner des pertes d’emploi et un déclin économique du pays. Tirer pleinement parti de ces avantages potentiels de la Zlecaf suppose de relever le défi de la complexité des règles d’origines de manière à réduire au maximum les obstacles et les incertitudes auxquels font face les entreprises, et façonner l’environnement dans lequel s’inscrivent les chaînes de valeur régionales.

Compte tenu de la multiplicité des communautés économiques régionales et des accords commerciaux préférentiels dans la région, l’harmonisation des règles pourrait réduire considérablement les coûts de transaction globaux et prévenir les arbitrages réglementaires. Pour y arriver, les règles d’origines doivent être conçues de manière à être simples, souples, transparentes, favorables aux entreprises et prévisibles. A l’inverse, des règles mal conçues pourraient conduire à une situation où il est plus simple et moins coûteux de faire du commerce avec des entreprises extra continentales qu’avec des entreprises africaines, ce qui irait à l’encontre de l’objectif de la Zone de libre-échange continentale africaine.

Vu que les règles d’origine ne fonctionnent pas en vase clos et que leurs effets dépendent du contexte, il faut conserver un certain degré de flexibilité et éviter d’imposer des conditions trop restrictives de sorte que les pays plus faibles sur le plan économique, comme le Burundi par exemple, notamment les petites et moyennes entreprises burundaises, puissent profiter eux aussi des débouchés offerts par la Zone de libre-échange continentale africaine.