L’une des recommandations du Great Lakes Economic Summit 2022 était de « Supprimer les subventions aux entreprises publiques en réduisant les distorsions des prix pour une régulation plus efficiente ». Pour notre collègue Janvier Cishahayo, la nouvelle politique monétaire qui supprime les restrictions sur le marché de change, est un bon pas qui vient d’être franchi dans la quête de cette libéralisation entamée.
« Tous les opérateurs vont s’approvisionner à travers leurs banques commerciales et les bureaux de change et non plus à la BRB. Les banques commerciales vont financer les importateurs et les bureaux de change vont s’occuper des demandes en devises pour des fins de consommation », énonce un communiqué de la banque centrale du Burundi, le 12 mai 2023.
En plus, depuis le 28 avril, la BRB réorganisait le Marché Interbancaire des Devises (MID), dans le cadre de renforcer la transparence dans la gestion des devises, et permettre aux banques commerciales d’échanger leurs liquidités en devises à un taux librement négocié.
En effet, les dispositifs de subventions qu’avait instaurés la Banque de la République du Burundi présentaient d’énormes failles. La présence forte des entités étatiques et ses démembrements au sein du secteur bancaire burundais créaient des privilégiés jouissant des passe-droits dans l’accès aux devises. Ainsi, mettre fin aux interventions directes de la banque centrale dans l’allocation des devises étrangères et aux lettres de confort, pour laisser la voie libre aux banques commerciales et aux bureaux de change agrées est à saluer. Une réforme qui va favoriser la transparence dans l’octroi des devises et l’élimination des passe-droits sur le marché des changes.
Pas à brûle-pourpoint
Pour le CDE Great Lakes, la décision de la BRB n’est pas venue à l’improviste. Elle est le résultat d’intenses préparations qu’avait amorcé le CDE via le Great Lakes Economic Summit 2022. Dans son exposé lors du Great Lakes Economic Summit 2022, le Pr. El MOUSSAOUI Hicham a montré que l’état alarmant des équilibres macroéconomiques avait créé une situation critique au niveau des entreprises, et que la solution n’était que la libéralisation et la déréglementation.
C’est ainsi que via ce sommet, le CDE a montré que le monopole du marché des changes par la BRB, et l’allocation des subventions aux institutions étatiques, nuisent au marché des devises. C’est ainsi que les recommandations de ce sommet suggéraient aux décideurs et aux législateurs de supprimer les subventions aux entreprises publiques, et abolir les monopoles via une réforme qui stimulera le développement du secteur privé où seules la demande et l’offre détermine le prix sans intervention de la BRB.
Moins d’Etat pour mieux d’Etat
Les récentes mesures prises par la Banque centrale après une période de restrictions par la Banque centrale, pour libéraliser la politique de change ont été saluées par plus d’un. L’instauration du Marché Interbancaire des Devises fonctionnel depuis le 04 mai 2023, devrait permettre d’identifier les vrais importateurs, puis d’organiser le marché interbancaire de devises sur lequel ils pourront s’approvisionner, pour leurs besoins en importations.
La politique monétaire et de change de la Banque Centrale devrait permettre à tout agent économique d’avoir accès aux devises de façon transparente, tout en veillant à la stabilité du marché de change. Les banques commerciales ont désormais la liberté de comparer et de faire jouer la concurrence en matière de prix lorsqu’elles font des transactions entre-elles.
Des défis encore à relever
Toutefois, l’anguille est toujours sous la roche. Les directeurs des plus grandes banques sont toujours nommés par le gouvernement. Et pour être servi par les bureaux de change, la BRB pose encore quelques conditions comme quoi il faut présenter le motif de l’achat des devises notamment les documents de voyage tel que le billet d’avion cacheté par la compagnie qui assurera le transport ou tout autre document justifiant le transport international, le passeport ou le laisser-passer valide, le visa, etc. Les bureaux de change sont de leur côté tenus de délivrer des bordereaux d’achat ou de vente de devises. En plus, l’interventionnisme étatique de la BRB est partiellement là, puisque la BRB se réserve d’intervenir sur le marché de change lors de l’importation des produits de carburants.
C’est ainsi que pour plus d’efficacité, cette libéralisation de la politique monétaire devrait continuer pour enlever toute entrave à la bonne gestion du marché des changes.