La meilleure façon de promouvoir l’emploi dans un pays, est de donner aux entreprises la liberté de le créer. Or, au Burundi, selon les données de l’Agence de Développement du Burundi (ADB), plusieurs entreprises sont créées annuellement, mais les emplois créés sont peu par rapport aux emplois projetés. Chiffres à l’appui, notre collègue Franck Arnaud Ndorukwigira explique quatre raisons à l’origine.

De 2014 à 2020, 23 710 entreprises ont été immatriculées au Burundi, avec une projection de création de 342 383 emplois.

Entreprises et emplois2014201520162017201820192020
Entreprises créées2 1701 5072 1742 2783 4217 5084 652
Emplois projetés 30 57512 80917 53619 41024 131217 78720 135

Ces chiffres donnent un espoir. Ces entreprises à foison sont une solution pour le chômage au Burundi via les emplois projetés. Malheureusement, ces statistiques ne reflètent pas l’image de la situation réelle. Le nombre d’emplois projetés n’a jamais atteint 100 %. Sur 3 012 emplois prévus au premier trimestre 2021, seuls 1 894 ont été créés. En 2019, sur 4 628 emplois prévus au troisième trimestre, il y a eu 3 245 emplois seulement. Au deuxième trimestre 2018, sur 2 929 emplois projeté, seulement 1 341 emplois ont été créés.

Mais, pourquoi l’emploi stagne chez ceux qui devraient le créer ? Il importe donc d’en comprendre les raisons. En voici quatre :

La faible viabilité des entreprises

Faire immatriculer une entreprise est donc facile au Burundi. La faire vivre est une autre paire de manche. En 2019, le taux de viabilité des entreprises variait entre 30 et 60 %. Ces chiffres témoignent que les entreprises nouvellement créées, tombent en faillite de manière précoce, et très peu parviennent à la maturité après la création, et par ricochet, ne peuvent pas créer de l’emploi. 

La santé financière des entreprises

Au Burundi, les micros, moyennes et petites entreprises constituant plus de 95 % du tissu entrepreneurial, peinent toujours à trouver du financement. Selon une étude, plus de 84 % des fonds viennent des familles, et moins de 13 % sont clientes des institutions prêteuses. Sans financement, ces entreprises ne peuvent pas devenir les plus grands moteurs de l’emploi comme projetés.

Un environnement éprouvant

La crise du Covid-19 et la guerre en Ukraine ont créé un environnement le plus éprouvant pour les micros, petites et moyennes entreprises au Burundi. L’impact sur l’offre et la demande pendant la pandémie et au cours de la guerre en Ukraine a eu de sérieuses conséquences économiques, causant une perte importante de revenu, compromettant les liquidités pour les entreprises par la réduction du pouvoir d’achat des Burundais, et la réticence des banques à fournir des prêts. Tout cela érode le pouvoir de création d’emploi des entreprises.

Le poids des taxes

Avant 2020, les ressources internes qui finançaient le budget de l’état (impôts et taxes) étaient passées de 70 % pour l’exercice 2017/2018 à 83,6 % pour 2019/2020. Depuis que le gouvernement cherche une indépendance budgétaire via la mobilisation des recettes internes pour financer son budget, plusieurs entreprises en ont payé le prix fort et plusieurs emplois ont été supprimés ou non créer. Dans le budget général de l’Etat, exercice 2022-2023, ce sont  14 nouvelles mesures fiscales qui ont été ajoutées. Qui paient ces taxes si ce ne sont pas les entreprises et les entrepreneurs ? Les exemples de la société Smart qui a fermé les portes à cause des arriérés d’impôts, ou celui d’Econet qui est sur le point de mettre les verrous sur la porte, en témoigne. Les impayés fiscaux d’Econet-Leo sont passés de 4 milliards de BIF en 2015 à plus de 88 milliards de BIF et 44 millions de dollars qui lui sont réclamés actuellement en 2023. Cette lourdeur des taxes risque de l’asphyxier ou peut-être de la tuer, et ces sont plusieurs emplois qui vont partir avec cette faillite. 

Il y a donc nécessité de faciliter les entreprises et entrepreneurs à créer de l’emploi, tout en libéralisant le marché de l’emploi pour le rendre plus flexible, et permettre à des Burundais de trouver un emploi décent. Pour réduire la pauvreté et promouvoir une prospérité partagée, la création d’entreprises doit créer plus d’emplois de qualité pour tous, car il s’agit de la voie la plus sûre pour sortir de la pauvreté.