L’une des causes profondes de l’emploi informel au Burundi est l’entrave au licenciement qui n’est pas facilité par le code du travail ou la politique national de l’emploi. Pour notre collègue Francis Cubahiro, si licencier n’est pas facilité dans le code du travail, cela accentue la précarité des travailleurs, le chômage et la sous-production entrepreneuriale.
Emploi de l’ombre, non déclarée ou informelle. Voilà une réalité très répandue au Burundi où la majeure partie de la population active du pays trouve ses moyens de subsistance dans les conditions de vulnérabilité et d’insécurité de l’emploi informel. Ce dernier recouvre des travailleurs indépendants, petits exploitants agricoles et des employés sans contrat de travail. L’organisation internationale du travail estime que l’emploi informel englobe environ 72% de l’emploi non agricole dans les pays de l’Afrique subsaharienne dont le Burundi.
Et l’emploi informel n’est pas sans conséquences. « Travaillant sans contrat, et percevant mon salaire en liquide de la main à la main du caissier de l’entreprise, je ne peux pas avoir accès au crédit », confie Claude Nderagakura de la coopérative Sangwe. Claude renchérit que les travailleurs informelles ne sont pas reconnus, enregistrés, réglementés ou protégés par la législation du travail et la protection sociale. « Je ne suis pas souscrit à une pension de la retraite, ce qui veut dire qu’à la retraite je n’aurai rien comme pension », ajoute-t-il. Cette situation de Claude témoigne que les travailleurs de l’emploi informel ne jouissent pas de la sécurité de leurs droits de propriété, ce qui les empêche d’accéder au capital, au crédit et à la protection sociale.
À l’origine…
Ce sont les entreprises qui créent des emplois, et non l’État. C’est en fonction de leur activité, de l’évolution des prix grâce auxquels elles se procurent ce dont elles ont besoin pour produire, des anticipations sur l’état futur des affaires comme les perturbations entrepreneuriales avec la récente épidémie de Covid-19, l’inflation et la baisse du pouvoir d’achat de la population, … qu’elles peuvent ou non le faire. Dans ces conditions, des licenciements peuvent en résulter. Mais si licencier n’est pas facilité par le code du travail ou par la politique national de l’emploi, en vue d’ajuster leurs effectifs, cela a toutes les chances de les mener à terme à la faillite, ou de les inciter à ne pas grandir.
En plus, l’hyper-règlementation du côté des licenciements accentue le chômage. Réduire le chômage ne devrait pas consister à grossir des effectifs déjà pléthoriques dans les entreprises ou dans les institutions étatiques. En facilitant les licenciements, il serait bien plus pertinent de recentrer les entrepreneurs sur les missions essentielles de l’entreprise, au lieu d’entretenir une armée de mécontents occupant des postes nombreux mais déqualifiés et de peu d’utilité sociale. Cela est a fortiori encore plus vrai pour des entreprises qui chaque jour doivent se battre pour affronter la concurrence, développer leurs activités ou tout simplement survivre lorsque les temps deviennent vraiment difficiles. L’entreprise qui aurait dû licencier et réduire la voilure en attendant des jours meilleurs, ou pour se recentrer sur ses activités cœur, fera faillite, et tous les salariés seront sur le carreau.
Rectifier le tir
La promotion de l’emploi formel pour tous les travailleurs, quel que soit leur lieu de travail, passera par le respect des principes et droits fondamentaux au travail tout en facilitant les licenciements comme on facilite les embauches. Il faut laisser les entreprises se créer et développer leur potentiel. Il faut cesser de les entraver par des réglementations car le chômage et l’emploi informel augmentent en même temps que grossissent les différents codes qui régissent la vie des entreprises, pourtant censés protéger les salariés et réguler le marché.