Du 28 mai au 6 juin 2021, le Burundi a organisé la quatrième édition de la foire « Made In Burundi » et la semaine de l’entreprise. Dans cette foire exposition-vente, le leitmotiv était d’interpeller les Burundais à s’habituer à consommer burundais.Une démarche risquée selon notre collègue Painette Niyongere qui y voit une autre forme de protectionnisme.

Tous se résument dans le thème de cette foire. « Contribuons à la création de l’emploi et à l’éclosion de l’investissement privé à travers les entreprises performantes par la promotion des produits Made in Burundi ». Évoquant ce thème, Jérémie Banigwaninzigo qui avait représenté le ministère du commerce, du transport, de l’industrie et du tourisme expliquait que c’est une occasion de faire connaître les produits « made in Burundi »pour que ceux qui consomment encore des produits étrangers alors qu’on en a ici, consomment burundais. Par-là, il a exprimé un souhait du ministère du commerce, de voir les burundais en train de consommer les produits « made in Burundi » à hauteur de 80%. Mais, à y regarder de très près, au-delà de ce qu’on voit avec cette politique de « consommer local », il y a aussi ce qu’on ne voit pas.

Un choix risqué

Faire la promotion de consommer burundais implique la prise des mesures protectionnistes. Et ces mesures sont déjà là, comme la restriction de l’accès aux devises pour contrôler l’exportation, des lois contre l’importation de certains produits locaux la farine et les graines de maïs et le lait, de même que l’exportation de l’huile de palme.Mais, si le Burundi ne fait pas attention, il risque de se tirer une balle dans le pied.

De  un, les entreprises qui transforment la production agricole sont encore moins nombreuses. De plus, la production locale est encore faible pour satisfaire les 12 millions de Burundais. Or, sans production locale suffisante, le Burundi se verra dans une perpétuelle pénurie des produits, et par ricochet entraînera une hausse des prix, ce qui affectera le consommateur. À titre d’exemple, au cours de l’année 2020, le Burundi a consommé 43 219 tonnes de sucre, alors qu’il n’a produit que 20 434 tonnes. Où sont venus les 22 785,1 tonnes qui manquaient, si ce n’était pas par importation ?En interdisant l’importation via cette politique, et si les autres pays répliquaient en fermant leur marché à nos exportations, que deviendra le consommateur burundais ?

De  deux, alors que le Burundi vient de ratifier la convention sur la zone de libre-échange continentale africaine, et que ce dernier prône le libre-échange et la suppression des barrières non-tarifaires, cette campagne de consommer burundais est à l’encontre de cette politique de la ZLECAF.

De trois, cette mesure va ouvrir les portes à la contrebande et à la fraude, et par-là, c’est le gouvernement qui va hausser les taxes pour récupérer ce qu’il perde via la fraude et contrebande. Cela aura un impact négatif sur la vie des gens, entraînant pauvreté et sous-développement.

De quatre, on ne s’étonnera pas que peu après le développement de cette politique, les entreprises publiques commenceront à faire face à la demande des subventions pour hausser la production enfin de surmonter les pénuries, et ce qui entraînera un cycle infernal bien connu au Burundi où l’Etat, par ses subventions, essaie d’être la solution aux problèmes qu’il crée.

De ma part, au lieu de faire la promotion de « consommer local », il fallait rendre nos produits « Made in Burundi » plus compétitif face aux produits importés, et par là, laisser le marché se réguler lui-même via la libre-concurrence, sans oublier le respect du libre choix des consommateurs.