Les pays membres de l’Union Africaine (UA) ont lancé le 7 juillet 2019 la « phase opérationnelle » de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLEC), qui doit constituer un pas vers la « paix et la prospérité en Afrique » et devenir « le plus grand espace commercial au monde ». Le Burundi parviendra-t-il à se tracer une voie dans la compétition avec les autres pays dans cet espace ? Éléments de réponse avec l’analyse de notre collègue Kelvin Ndihokubwayo.
Le 30 mai 2019 est entrée en vigueur la nouvelle zone de libre-échange continentale (ZLEC), l’une des plus vastes au monde si l’on raisonne en termes du nombre de pays impliqués (soit plus de la moitié des pays du continent), démographique (près de 1,3 milliard de personnes en 2019), ou d’étendue géographique.
Dans sa vision, l’accord prévoit le commerce intra-africain en réduisant les barrières tarifaires et non tarifaires, et en améliorant les perspectives de diversification des exportations de produits manufacturés pour les pays africains. La volonté concrète de cette zone étant de fluidifier les échanges au cœur du continent afin d’en faire un socle pour le développement de l’Afrique, le rôle des entreprises et industries entre en jeu.
Au pays des tambours, le secteur secondaire est encore embryonnaire. Les industries et les autres unités de transformation ne sont qu’au stade de fœtus. En 2018, au Burundi, ce secteur constituait 15% du PIB national derrière le primaire (36,3 %) et le tertiaire (39%). Dans cette configuration, avec un tissu industriel qui se cherche encore, il sied de se demander si le Burundi aura une place dans la compétition sur le marché de libre-échange africain vu que l’industrie et les entreprises de productions peinent à trouver ses marques.
Le Burundi a des défis à relever
Dire que les entreprises burundaises n’auront pas de place dans la concurrence avec les entreprises des autres pays serait mentir. Pourtant il y a des prérequis pour le Burundi avant d’entrer dans cette compétition. Le Burundi n’y parviendra que si il cible les segments prioritaires de son commerce. L’économie burundaise est principalement rurale, basée essentiellement sur l’agriculture et l’élevage. La production agricole se répartit entre les produits destinés à l’exportation comme le café, le thé, le coton et la culture vivrière.
Se focalisant sur ses produits agricoles destinés à l’exportation, soulignons qu’ils ont une faible valeur ajoutée puisqu’ils sont exportés à l’état brut. Rappelons aussi qu’au Burundi, les exportations des produits manufacturés sont presqu’inexistantes. Donc, le Burundi doit faire des innovations au service de l’agriculture dans les zones rurales couplées à un investissement dans les infrastructures de base (la construction des infrastructures qui permettront l’interconnexion des pays et des régions comme les routes, chemin de fer, ponts, aéroports, énergie, télécommunication), la santé et l’éducation pour hausser les compétences humaines. En plus, pour diversifier les exportations en termes de produits manufacturés, le Burundi doit accélérer son industrialisation conformément aux objectifs du Plan National de Développement (PND 2018-2027). Le troisième axe du PND prône une industrie dynamique, diversifiée et compétitive aux niveaux régional et international.
Libre circulation, un atout
Dans la ZLEC, la libre circulation des biens et services donnera aux opérateurs économiques burundais les possibilités d’exercer sans beaucoup de difficultés (suppression de barrières tarifaires et non tarifaires,…). Comme on apprend des autres, les opérateurs burundais pourront acquérir de l’expérience et harmoniser leurs produits aux standards du marché, ce qui créera la compétitivité des entreprises burundaises. La technologie se transmet par le commerce. Seulement il faut que les agences de normalisation et de certification des produits burundais se mettent à l’œuvre.
Nonobstant pour gagner la compétition, l’innovation et la créativité dans la production sont à exiger. Donc, en ce qui est de la capacité d’innovation, les décideurs devront miser sur ce pilier pour favoriser une formation d’universitaires capables d’innover. Il faudra notamment mettre en place des centres de recherches, afin que nos chercheurs aient accès à des centres de recherches bien équipés qui leur permettent de mener et publier leurs recherches. Certes pour concurrencer les autres, c’est un travail de dur labeur pour les entreprises burundaises car les autres pays ont déjà décollé d’où pour le Burundi, le chemin sera long.