Le Burundi n’ayant pas été épargné par la deuxième vague de Covid-19, plusieurs nouvelles mesures viennent d’être prises par le gouvernement pour contrer sa propagation. Pour notre collègue Francis Cubahiro, ces nouvelles mesures barrières risquent de freiner l’entrepreneuriat. Et si le Burundi s’y prenait autrement ?
Alors que le taux de positivité hebdomadaire du Covid-19 au Burundi était constamment en dessous de 1 % depuis le mois d’août jusqu’en décembre 2020, il vient de grimper jusqu’à 3,4 % au cours de la première semaine de janvier 2021. Face à cette flambée des contaminations, les autorités viennent de durcir les mesures barrières.
D’un, alors que la frontière avec la Tanzanie n’était pas concernée par la fermeture des frontières, aujourd’hui, ce sont toutes les frontières tant terrestres que maritimes du Burundi qui viennent d’être fermées aux personnes, mais pas aux marchandises. De deux, pour les passagers qui arrivent de l’aéroport, la quarantaine obligatoire dans les hôtels choisis par le gouvernement vient de passer de 72 heures à 7 jours, et sur les propres frais des voyageurs. En plus, les hôtels qui hébergent les voyageurs en quarantaine, n’offrent aucun autre service à part ça, et sont fermés à tout autre client. De trois, les boîtes de nuit et les karaokés viennent eux aussi d’être fermés, jusqu’à nouvel ordre. Et cela, n’est pas sans conséquences.
Le cri des entrepreneurs
Selon Denis Nshimirimana, secrétaire général de la chambre fédérale de commerce et d’industrie du Burundi, faire passer la quarantaine de 72 heures à 7 jours, dans des hôtels qui coûtent les yeux de la tête, est une entrave de plus pour les investisseurs et entrepreneurs. Il donne l’exemple d’un commerçant qui vient avec ses marchandises, et qui passe 7 jours dans un hôtel à 100 USD/nuit à sa charge. Comment vouloir investir dans ces conditions ? Normal même qu’il va répercuter ces frais sur le prix de vente, et c’est le consommateur qui va en payer le prix le plus cher.
Quant’à Pacifique, responsable d’une boîte de nuit à Kamenge, il crie halte à la fermeture sélective : « Je travaille à perte alors que les bars et les marchés qui eux aussi attirent beaucoup de monde, sont restés ouverts. Pourquoi nous ? », se demande Pacifique.
Pour Eric Ntangaro, secrétaire exécutif de l’Association des transporteurs internationaux du Burundi, même si la libre circulation des marchandises est maintenue, la mesure de délivrer l’attestation du Covid-19 à Bujumbura seulement, par l’unique laboratoire étatique, va faire perdre du temps aux chauffeurs. Et si on décentralisait la délivrance de cette attestation à la frontière ?
D’autres solutions locales
Sans nier la gravité de la Covid-19, ni même douter de l’efficacité des mesures prises et aborder leurs conséquences, le gouvernement burundais devrait s’inspirer des pays qui ont réussi à limiter la propagation de la Covid-19 sans détruire leur économie. Ces quelques mesures sont :
– Ne pas fermer les frontières nationales, mais les contrôler par la preuve de tests négatifs au Covid-19. Cela réduira aussi la durée de la quarantaine.
– Décentraliser et numériser le laboratoire qui délivre les attestations de Covid-19 pour rendre opérationnel le « régional cargos and drivers trucking system » et faciliter la libre circulation des marchandises sans perte du temps.
– Mettre à disposition des Burundais suffisamment de tests PCR avec résultat le jour même, et non jusqu’à 3 jours comme actuellement, pour un isolement du malade le temps qu’il ne soit plus contagieux, et surtout des tests antigéniques (résultat en 20 minutes) déjà massivement utilisés chez certains voisins depuis plusieurs semaines.
Face à cette interminable crise du Covid-19, il appartient à l’État de revoir la balance bénéfices/risques des mesures prises à l’encontre de la liberté d’entreprendre, car ce sont bien ces mesures, et non l’épidémie de Covid-19, qui va enfoncer l’économie burundaise.