Alors que le monde célèbre depuis le 25 novembre, les 16 jours d’activisme pour mettre fin à la violence faite aux femmes, une série de mesures visant à restreindre la libre-circulation des femmes et filles pleuvent à verse ces derniers jours au Burundi. Coup de gueule de notre collègue Païnette Niyongere pour le respect de la liberté des femmes et filles burundaises.

C’est une évidence. Restreindre la liberté de circuler aux femmes et filles fait partie des violences basées sur le genre. Et au Burundi, de telles restrictions sont une réalité. Le 5 novembre 2020, l’administratrice de la commune Ruhororo (province Ngozi) a imposé un couvre-feu de 20h00’ aux femmes de sa localité, pour qu’elles soient rentrées, et surtout pour qu’elles aient quitté les bars. Le 23 novembre 2020, via un communiqué, c’est l’administratrice de la commune Mutumba (province Karuzi) qui a restreint la libre-circulation d’une fille du nom de Riziki pour motif d’adultère.

Ce couvre-feu, imposé aux femmes, n’est pas la première. Le 6 mai 2019, pour soi-disant enrayer « la prostitution et l’adultère », l’administrateur de la commune Musongati (province Rutana) a interdit aux femmes et aux filles de sortir de chez elles après 19h, non accompagnées par leur conjoint légal, que ce soit pour se rendre au bar ou au marché. Et en mars 2019, à Muyinga et à Giteranyi (province Muyinga) et à Nyabiraba (province Bujumbura), trois autres administrateurs communaux ont formellement interdit aux jeunes filles de circuler dans les rues avec des garçons au-delà de 18 heures, ou de rentrer après 19h, pour éviter de s’exposer aux risques de grossesses non désirées.

Free Mind, Free people

Sous le poids de grossesses non désirées et phénomènes de prostitution croissants, les autorités locales restent convaincues que les femmes et les filles sont la seule cause de tous ces maux. Ce qui est archi faux. Comment une femme peut, elle seule, être tenue responsable pour un acte qui normalement se commet à deux ? Ou bien, l’adultère n’est-il pas possible avant 19 heures ? En plus, la plupart des écolières et élèves filles sont issues des familles pauvres et sont obligées de quitter leurs résidences le soir pour aller réviser les cours dans des endroits où il y a de l’électricité. Comment vont-elles s’y prendre vu qu’elles sont privées de sortie au-delà de 18 heures ?  Il y a aussi des filles/femmes qui via l’entrepreneuriat, travaillent toute la journée et rentrent tard. Seront-elles obligées d’interrompre leur travail avant le moment habituel ?

Violation du droit et de la liberté

En adoptant ces mesures, ces administrateurs oublient que ces mesures violent certaines dispositions de la constitution du Burundi. L’article 22 stipule que « Tous les citoyens sont égaux devant la loi, qui leur assure une protection égale. Nul ne peut être l’objet de discrimination du fait notamment de son origine, de sa race, de son ethnie, de son sexe, de sa couleur, de sa langue, de sa situation sociale,… ». Et l’article 25 d’ajouter que « Tout être humain a droit à la liberté de sa personne, notamment à l’intégrité physique et psychique et à la liberté de mouvement… ».

De ma part, si les administratifs n’ont pas de réponses aux différents problèmes qui minent la société burundaise, ils/elles ne devraient pas jeter le tort aux femmes et filles en prenant des mesures bafouant les droits leur réservées par les textes légaux, car ceci pourrait constituer un recul important en matière de droits et liberté de la personne humaine.